Le 20 décembre 2016
Les promenades hivernales dans le Domaine du Rayol sont des moments précieux. Le soleil généreux, mais trop bas pour vraiment chauffer, les ombres si longues et l’air si transparent. Alors qu’ailleurs, les ondes radiophoniques nous parlent d’air pollué, nous respirons ici avec sérénité.
En suivant le cheminement du haut à travers la parcelle de Californie puis la parcelle d’Australie, certaines arbustes ont disparu suite à la dernière sécheresse. Avec le temps, nous repérons ces petits secteurs du jardin où le sol est très ‘’séchant’’, certainement à cause du sous-sol avec une roche mère plus compacte, où les racines n’arrivent pas à descendre chercher l’eau. De nouvelles plantations devront tenir compte de cette connaissance.
L’histoire de la grande perspective du Jardin
Arrivé en haut de la grande perspective, le regard plonge dans le vallon. Connaissez-vous l’histoire cette perspective ?
D’abord il y a eu la Pergola construite au début des années 20, inspirée des œuvres de Ferdinand BAC de la région de Menton.
Puis, à la fin de la 2nde guerre mondiale, un obus tiré par un navire américain atterri dans le jardin, laisse une grande cicatrice qui sera reprise pour créer les grands degrés qui descendent de la Pergola au vallon. L’angle entre les degrés et la pergola n’est pas de 90°, le hasard balistique en avait décidé autrement.
Et dans les années 90, Gilles CLEMENT réutilise les éléments présents – toujours faire avec l’existant – pour dessiner cette perspective afin de structurer le jardin, prolongement par un escalier vers le haut et au-delà du vallon. Et c’est ici qu’arrive le 2ème coup de hasard. Le maçon en charge des travaux interprète mal les plans, ou les plans ne sont pas assez explicites. Le haut de la perspective – les escaliers – n’est pas aligné avec tout le reste. Et Gilles CLEMENT accepte le biais, l’à-peu-près, l’approximatif. De cette courbure naît une poésie. Les deux alignements de cyprès de Provence suivent la tendance. Ils ne sont pas taillés, ils sont un peu abîmés par une trop grande proximité avec les arbres voisins, ceux que nous réduisions le mois dernier. Pour certains, des rameaux de Plumbago sortent de façon imprévue à mi-hauteur, ils ne sont pas symétriques. Mais quelle émotion, quelle harmonie ! Cette perspective censée structurer le jardin, de fait, contribue à introduire le flou, l’incertain.
Redessinons le paysage
En allant vers le Rayolet, nous arrivons vers la parcelle du Chili. Ce paysage a été très marqué par la dernière sécheresse, et les jardiniers profitent de cette opportunité. Le hasard a tranché, et certaines pousses de laurier-sauce, quelques arbustes ont séché, sont morts. Un gros mimosa, et surtout un chêne-liège assez gros, tous deux déjà sénescents, ont séché sur pied. Nous profitons de cette situation pour redessiner le paysage, enlever le gros mimosa pour former une nouvelle clairière – on verra l’année prochaine la réaction de la végétation -, et surtout bien mettre en valeur le chêne-liège mort qui va devenir un énorme réservoir de biodiversité. Les pervenches au sol déjà reverdissent, et bientôt nous pourrons renforcer au sol la prairie d’alstroemères.
Dans ce secteur, il faut lâcher tout contrôle pour permettre la vie, et la mort. Le mouvement.
Les jardiniers du Domaine du Rayol