Focus : Parasitoïdes et hyperparasitoïdes, de quoi s’agit-il ?

Focus : Parasitoïdes et hyperparasitoïdes, de quoi s’agit-il ?

Le 24 novembre 2021

Des insectes, des plantes ou autres êtres vivants qui en parasitent d’autres, c’est connu.
Mais qu’est-ce qu’un parasite ?
« C’est un organisme qui vit aux dépens d’un hôte pour obtenir tout ou partie des substances nutritives dont il a besoin. » Pour résumer, le fameux hôte fournit le gîte et le couvert sans son accord préalable. De fait, le parasite est dépendant de son hôte durant son développement.

Les effets du parasitisme d’un hôte à un autre sont différents. Certains auront peu d’effet, d’autres vont impacter le développement de l’hôte ou alors ne lui laisseront aucune chance de survie…

Avez-vous déjà entendu le terme parasitoïde ?
Une petite subtilité est à apporter quant à ce mot. A la différence du « vrai » parasite, seuls les stades larvaires de l’insecte parasitent un hôte unique. Ce dernier disparaîtra irrémédiablement au cours ou à la fin du développement du parasitoïde.

Metopius

Metopius, de la famille des Ichneumonides, parasitoïdes bien connus

Dans cette catégorie, il y a des insectes, des nématodes, des champignons, des bactéries, des virus, des protozoaires, etc. Mais la grande majorité d’entre eux sont… roulement de tambours… des insectes !
Sur le podium, nous avons des guêpes, de la famille des hyménoptères, et des mouches, de la famille des diptères, et quelques coléoptères. Leur rôle dans la régulation d’insectes dits ravageurs est souvent sollicité. C’est pourquoi on les retrouve en lutte biologique.

Selon les cas, il y a des ectoparasitoïdes, qui consomment l’hôte de l’extérieur en étant protégé par un cocon dans des tissus végétaux. Les œufs sont pondus à côté ou à la surface de l’hôte et la larve va ensuite chercher son hôte. Il y a aussi des endoparasitoïdes, qui se développent dans l’hôte… Gloups !

Les œufs sont pondus dans un hôte et, à l’éclosion… attention le film d’horreur… la larve se développera dans l’hôte, vivant, et le dévorera. Est-ce qu’une certaine scène du film Alien se rejoue ici ? Oui. Les films s’inspirent bien de quelque part…

Chez les parasitoïdes, on distingue les solitaires dont une seule larve se développe aux dépens de son hôte, des grégaires dont plusieurs larves cohabitent au sein de celui-ci. Certains font des réunions de famille et les œufs déposés à l’intérieur ou à côté de l’hôte se retrouvent parfois en surnombre : on parle de surparasitisme quand d’autres voient des copains s’inviter au buffet. Lorsque plusieurs espèces parasitent le même hôte et que de la compétition intervient, on parle alors de multiparasitisme.

Pour certains parasités, la chance est au rendez-vous : les parasitoïdes se contentent de paralyser l’hôte sans le tuer au moment de pondre leur œuf. Ce sont des parasitoïdes koïnobiontes. Enfin, pendant un temps… Cela donne un léger répit à l’hôte avant l’éclosion du petit parasitoïde…
La femelle va poser des œufs sur des hôtes de très petites tailles qui achèvent leur développement avant celui du parasitoïde. Ainsi la femelle évite les foudres d’un hôte plus gros. Malin !

D’autres, en revanche, ne donnent pas cette chance : ils sont tués ou paralysés définitivement par le parasitoïde. Ils sont dits idiobiontes. Leur développement est plutôt rapide après la ponte et l’hôte émerge au moment où la ponte est effectuée.

Un petit exemple proche de chez nous : les scolies à front jaune. Si vous êtes venus au Domaine du Rayol, vous avez certainement entendu parler de cette grosse guêpe. C’est un parasitoïde des larves souterraines de coléoptères et notamment les larves d’Oryctes nasicornis laevigatus, plus connu sous le nom de scarabée rhinocéros d’Europe. La femelle passe une bonne partie de sa vie à chercher la larve-hôte. Une fois trouvée, elle paralyse la larve et pond ses œufs dessus.
Si vous avez suivi jusque-là, on qualifie alors la scolie d’ectoparasitoïdeidiobionte.

Megascolia maculata - Scolie des jardins mâle

Megascolia maculata – Scolie des jardins mâle

Oryctes nasicornis - Scarabée rhinocéros européen

Oryctes nasicornis – Scarabée rhinocéros européen

 

 

 

 

Dans la famille du parasitisme, je demande le niveau supérieur.
Il existe des insectes parasitoïdes qui parasitent d’autres insectes parasitoïdes dits primaires. Les premiers de la chaîne. Ce sont les hyper parasitoïdes ou parasitoïdes secondaires.
Certains de ces hyper parasitoïdes deviennent la proie d’un autre parasitoïde. Ces derniers sont des parasitoïdes tertiaires qui peuvent également devenir la proie de parasitoïdes quaternaires, phénomène plus rare. Toujours plus… On trouve donc des insectes, qui sont parasités par d’autres insectes, qui sont parasités par d’autres insectes, qui…
Arrêtons-nous là, vous avez saisi l’idée ! Ils peuvent parasiter des individus de leur propre espèce ou se développer aux dépens d’espèces différentes de la leur.
En lutte biologique, pour certaines cultures, on se sert de ces relations entre les insectes pour réguler certaines populations d’insectes introduits sur nos territoires qui impactent de manière économique les cultures.

Plusieurs méthodes peuvent être utilisées : soit on augmente le nombre de parasitoïdes en les introduisant dans les cultures, soit on aménage l’environnement afin de faciliter leur venue et leur multiplication autour des cultures.
Par exemple, en réintroduisant des espèces végétales hôtes, associées ou servant de relais comme l’inule. Au sein d’une même plante, différents parasitoïdes peuvent être présents. Certains sont des généralistes (ils s’attaquent à des hôtes variés et à plusieurs ordres d’insectes) et d’autres sont dits solitaires (ils ne s’attaquent qu’à une seule espèce).
C’est tout un complexe de parasitoïdes et prédateurs qui peut se développer autour d’une espèce végétale.

Ces espèces relais maintiennent ainsi une dynamique d’insectes bénéfiques et permettent de réaliser une lutte biologique face à d’autres insectes impactant les cultures, qu’ils soient indigènes ou introduits. Dans la lutte biologique, gardons en tête que ces insectes parasitoïdes et leur rôle dans la régulation d’autres insectes ont un impact positif sur l’écosystème tant que leur population ne prend pas le pas sur d’autres. C’est un équilibre qui reste fragile. Aussi, l’introduction d’une espèce exotique dans ce but doit être bien réfléchi.

Connaître les interactions et comprendre les mécanismes entre ces espèces animales et végétales est alors indispensable afin de permettre un rééquilibrage naturel qui peut prendre plusieurs années. Ces années que nous ne sommes parfois pas prêts à attendre. Laisser la nature faire le travail à notre place est parfois plus bénéfique que d’y apporter notre grain de sel.

Pauline Arnéodo
Guide-animatrice au Domaine du Rayol

Sources :
https://www.supagro.fr/ress-pepites/Opale/ProcessusEcologiques/co/PP_Hyperpara.html#:~:text=Exemple%20%3A%20P.,Asobara%20tabida%20et%20Leptopilina%20heterotoma
http://entomofaune.qc.ca/entomofaune/Pucerons/hyperparasitoide.html
http://ephytia.inra.fr/fr/C/26382/Vigne-Biologie-des-parasitoides
https://perso.univ-rennes1.fr/denis.poinsot/POP/TP_Parasito%C3%AFdes/parasitoids%20the%20game,%20le%20debriefing%20illustr%C3%A9.pdf
Brice F., Les mots de la botanique, Actes Sud.
Vereecken N. Carriere J., Contribution à l’étude éthologique de la grande scolie à front jaune Megascolia maculata flavifrons (F., 1775) (Hymenoptera, Scoliidae) en France méditerranéenne. Notes fauniques de Gembloux, n° 53 (2003) : 71-80 (https://www.animateur-nature.com/telechargements/animaux/scolie-jardin.pdf)
https://www6.inrae.fr/encyclopedie-pucerons/Pucerons-et-milieu/Antagonistes/Hyper-parasitoides
Photo couverture : Scolie des jardins femelle © Domaine du Rayol