Le 2 avril 2017
Rencontre avec la spectaculaire « plante mangeuse de moutons »
En voyageant autour du monde, un arrêt s’impose : l’Amérique du Sud. Partons à la rencontre d’une contrée influencée par le climat méditerranéen. C’est au pied de la Cordillère des Andes que commence le périple au Chili ! Cette chaîne montagneuse recèle de nombreux trésors comme ces imposants coussins épineux proches des ananas : les Puyas !
Au Domaine du Rayol, dans le Jardin du Chili, leur floraison aux couleurs variées débute. Elle passe par les bleus métalliques, le vert pomme ou encore le jaune or. Notre histoire commence devant le Puya du Chili ou Chagual, nom local, que l’on appelle en latin Puya chilensis.
Le Puya chilensis est une plante herbacée formant une rosette assez dense pouvant mesurer jusqu’à 2 m de diamètre. La hampe florale – ensemble de fleur – peut atteindre 6 m de haut et les fleurs vert-jaunâtre peuvent mesurer 5 cm de long. Dans son pays d’origine, la floraison dure de septembre à décembre. La plante présente des épines acérées couvrant le bord de ses feuilles. Elles lui servent de protection naturelle contre les herbivores… D’ailleurs les Anglais l’ont nommée « the sheep eating plant ». On peut le traduire par « la plante mangeuse de mouton ». Imaginez-vous un mouton au milieu des Puyas… Pris au piège le mouton meurt de faim et sert de nourriture. Loin d’être carnivore, le Puya chilensis a hérité d’un surnom qui ne lui rend pas hommage…
Quelle belle coévolution !
Le Puya chilensis est inféodé au climat méditerranéen. On le retrouve donc le long du littoral chilien, entre 300 et 1000 m d’altitude, sur les coteaux arides, les falaises rocheuses et les ravins. Il est plus abondant dans les vallées côtières, sur les versants nord et ouest du matorral, jusqu’aux plateaux andins. Sa rusticité (ou résistance au gel) est proche des -6°C. Ainsi, on ne le rencontrera pas en altitude sur la cordillère des Andes. Les populations sont segmentées par groupes de plusieurs individus. L’expansion des stations balnéaires chiliennes pourrait, à long terme, menacer cette espèce.
Les Chiliens mangent traditionnellement les jeunes hampes florales qu’ils considèrent comme une asperge géante. Coupées en fines tranches, ils les consomment en salade. Les épines et les fibres de la feuille peuvent servir dans la pêche traditionnelle. Les épines serviront d’hameçons et les fibres à confectionner des filets de pêche. Le nectar des fleurs pourrait également être utilisé en cas de douleur à l’oreille, surement en cas d’otite.
Le genre Puya, répandu en Amérique du Sud, est apparu il y a environ 10 millions d’années. Celui-ci est assez jeune, les plantes à fleurs datent d’environ 120 millions d’années. Les Puyas font partie des Bromeliacées, famille regroupant des plantes épiphytes (plantes qui ont des racines aériennes et qui captent leurs nutriments par les racines et/ou les feuilles). Ce sont des plantes vivant dans la canopée, fixées sur les branches d’arbres, principalement en Amazonie. Elles sont du genre Tillandsia, et d’autres genres, tels que l’Ananas.
Cette Bromeliacées sud-américaine a la particularité d’être pollinisée par des oiseaux. Ceux-ci vont être attirés par ses fleurs de grande envergure, colorées, adaptées au bec des oiseaux. Les fleurs possèdent une dose remarquablement élevée en nectar (1 dé à coudre). Ce qui permet de nourrir les oiseaux nectarivores.
Une espèce de papillons en danger, Castnia psittacus, est inféodée à Puya chilensis et Puya berteroriana. La femelle pond des œufs sur les jeunes feuilles. Les larves évoluent pendant 1 à 2 ans en mangeant les tissus des feuilles. Une fois adulte, le papillon se nourrit du nectar et par l’occasion devient agent pollinisateur.
Quelle belle coévolution !
Les jardiniers du Domaine du Rayol