Mycologie : Myriostoma coliforme, l’étoile de terre du Rayol

Mycologie : Myriostoma coliforme, l’étoile de terre du Rayol

Le 3 décembre 2020

Myriostoma coliformeMyriostoma coliforme, mais qu’est-ce que c’est ? Jamais entendu parler ! Eh bien nous non plus au Domaine du Rayol, jusqu’à ce que, par hasard, je découvre un champignon complètement aplati sur un des chemins du Jardin des Méditerranées. Ce champignon m’a interpellée, et découvrir où il pouvait bien pousser est devenu mon nouvel objectif. Car même s’il était aplati, il devait bien pousser non loin de là ! Et voilà qu’un jour, un jeune collégien en visite au Jardin m’en trouve un similaire… entier ! Vient alors le temps de l’identification…


Identifier un champignon ? Pas si facile !

La mycologie, ou l’étude des champignons, est un domaine de la science assez difficile. Cela demande du temps et parfois du matériel assez poussé si l’on veut vraiment bien identifier les espèces face à soi. Bon, pour reconnaître des cèpes, ça ira, pas besoin de microscope !

Certains critères sont bien utiles, tels que la consistance de la chair, l’implantation des lames (s’il y en a), l’odeur, le goût (oui, parfois on vous demande de « goûter » d’après certains livres…), la couleur de la sporée (nom donné aux amas de spores, qui permettent de mieux voir leurs couleurs), etc. Sans parler des couleurs et des formes générales, même si parfois ça porte à confusion. Bref ! Nous nous égarons et je souhaite vous parler de ce beau champignon, vous êtes ici pour cela.


Une « étoile terrestre »

Oui, je parle d’étoile de terre, et non de mer. C’est vrai que quand l’on regarde ce drôle de champignon, on voit bien qu’il y a, dessous, comme les branches d’une étoile. Figurez-vous qu’il fait partie de la famille des geastraceae. Les géastres signifient étymologiquement « étoiles terrestres ». Plutôt poétique non ?

Dessin de Myriostoma coliforme par James Sowerby

Dessin de Myriostoma coliforme par James Sowerby © Figures of English Fungi or Mushrooms, 1803

Ce champignon, comme le titre de l’article l’indique, s’appelle le Myriostoma coliforme, seule espèce de ce genre. Sa forme est des plus atypiques, comme s’il était constitué de deux parties. En fait, on dit qu’il possède plusieurs enveloppes : une enveloppe interne (appelée endoperidium) qui est cette boule centrale qui fait penser aux Vesses de loup (Lycoperdon sp.), et une enveloppe externe (exoperidium) qui est cette fameuse étoile. L’exoperidium est dure et coriace, contrairement à l’endoperidium qui est plus fine et contient les spores. L’exoperidium protège l’autre enveloppe en étant complètement refermée sur celle-ci. A maturité, l’enveloppe coriace va s’ouvrir en étoile, et l’endoperidium va alors pouvoir libérer ses spores. Ça va, je ne vous ai pas perdus ?

Les géastres ont généralement un ostiole central (une ouverture) sur leur fameuse boule centrale afin de libérer les spores, mais ici, cette espèce en a beaucoup plus. C’est pour cela qu’on la surnomme la « poivrière » ou « pepper pot » chez les Anglais. Car en plus de cela, ses spores sont très foncées (de couleur brun chocolat), cela fait donc encore plus penser au poivre.

Si l’on observe bien ce champignon, on a l’impression qu’entre la boule centrale et l’étoile dessous, il y a quelque chose… Comme si la boule s’était « accrochée » à cette étoile.


Serait-ce un champignon mutant ?

Myriostoma coliforme

Myriostoma coliforme

Non pas du tout ! La particularité de ce champignon, c’est qu’il a ce que l’on appelle des pieds entre l’endoperidium et l’exoperidium, qui forment des petites colonnes (d’où le coliforme). Ces pieds donnent l’impression d’une fusion entre deux champignons distincts. Chose intéressante à noter : il y a autant de pieds que d’ostioles sur l’endoperidium !

 

Maintenant que je vous ai décrit l’apparence externe de ce beau spécimen, il est important de parler de son écologie.


Où trouver ces champignons ?

Ces champignons sont très difficiles à observer. En effet, parfois on ne voit que la boule centrale dépasser du sol et on pourrait confondre cela avec une petite pierre… Ils vont pousser assez isolés ou en petits groupes, et sortent de la terre généralement en été ou en automne. Cette espèce apprécie les zones de taillis, de sous-bois clairs, mais surtout le sol sableux. Elle n’a pas vraiment d’espèce végétale associée, on peut la retrouver sous des robinier faux acacia (Robinia pseudoacacia), des chênes verts (Quercus ilex), des mimosas (Acacia sp.), etc.

Comme je vous l’ai dit, il est difficile à observer… Il y a même des zones où des mycologues pensaient qu’il avait disparu, mais des années après, il est réapparu ! L’espèce a quand même été signalée sur la belle île de Porquerolles en 1996 par Jean-Louis Cheype (mycologue membre de la Société Mycologique et d’Histoire Naturelle de la Région du Mont-Blanc).

Il est intéressant de noter quand elle réapparaît, ses observations étant assez rares.

Bon, qu’on se le dise, si vous pensiez partir à la chasse à notre petite poivrière pour vous faire un bon repas, je vous arrête tout de suite : elle n’est pas comestible !

Alors, finalement, où se trouve ce beau champignon au Jardin des Méditerranées ? Eh bien, ça restera notre petit secret…

 Chloé Gosselin
Volontaire en service civique